Kevin Goheen

Il y a environ 10 ans, on m’a demandé de gérer un programme spécial pour le Collège Algonquin, à Ottawa, au Canada. Le programme de Technologues en sciences du génie civil formés à l’étranger (ICTET) réunissait 35 ingénieurs civils en milieu de carrière ayant immigré au Canada mais n’ayant pas été en mesure de se trouver un emploi, car ils avaient rencontré des défis afin d’être désignés comme ingénieur. Dans le cadre du programme ICTET, nous avons condensé un programme de trois ans de technologue en sciences du génie civil en un an, tout en bonifiant certaines parties du programme avec des cours d’anglais langue seconde et un court stage coop. Tous les diplômés ont éventuellement trouvé du travail dans leur domaine.

Une étude de Statistique Canada récemment publiée et intitulée Utilisation des compétences des immigrants : immigrants ayant fait des études en STGM et tendances en matière de surqualification révèle que seulement 39 % des immigrants possédant un baccalauréat en STGM travaillaient dans un poste en STGM (sciences, technologies, génie, mathématiques) en 2016. Ceux ayant trouvé un emploi en STGM gagnaient 28 % de moins que les diplômés en STGM nés au Canada. Seulement 48 % des immigrants diplômés en ingénierie occupaient un emploi en STGM. Les immigrants n’étaient pas les seuls à être sous-employés en STGM; seulement 66 % des diplômés en ingénierie nés au Canada détenaient un emploi en STGM, ce qui constitue une partie d’un problème plus vaste auquel on doit remédier.

Les étudiants qui décident d’étudier en ingénierie à l’université veulent généralement faire carrière en ingénierie. Même si l’ingénierie est une profession réglementée au sein des provinces et territoires canadiens, vous noterez que seulement une fraction des étudiants diplômés d’une université canadienne menant une carrière technique sont des ingénieurs certifiés (désignation mieux connue sous l’appellation anglophone Professional Engineers, ou P.Eng). Au sein de plusieurs industries, comme dans le domaine des logiciels et de l’électronique, les employeurs n’exigent pas que les employés aient cette désignation. Toutefois, dans d’autres industries, comme en génie civil et en construction et en mécanique des bâtiments, posséder le statut de P.Eng est essentiel. Veuillez noter que si vous n’êtes pas certifié par l’entremise de l’organisme de réglementation de votre province, vous ne pouvez pas utiliser le titre « d’ingénieur certifié ou professionnel », de « P.Eng » ou « d’ingénieur » ou tout autre titre qui pourrait vous représenter à tort en tant qu’ingénieur professionnel certifié. Il est illégal d’utiliser un de ces titres si vous n’êtes pas certifié par l’organisme réglementaire de votre province. Une façon de vous présenter est de vous identifier comme « diplômé en ingénierie formé à l’étranger ».

La réglementation de la profession d’ingénieur au Canada est régie par les ordres provinciaux et territoriaux. Vous noterez que les processus de réglementation peuvent varier. Ingénieurs Canada est un organisme national qui aide à coordonner les réglementations d’un bout à l’autre du pays et qui présente un site web, https://engineerhere.ca/fr, qui résume les informations les plus importantes.

Afin de devenir un ingénieur certifié au Canada, vous devez démontrer que vous répondez à cinq exigences de l’organisme de réglementation en ingénierie de la province ou du territoire où vous souhaitez travailler :

  • Éducation: Vous avez complété des études en ingénierie.
  • Expérience de travail: Vous détenez de l’expérience de travail supervisé démontrant votre capacité à mettre en pratique vos connaissances en ingénierie.
  • Langue: Vous pouvez communiquer de manière compétente dans au moins une des deux langues officielles du Canada, le français ou l’anglais.
  • Bonne personnalité: Vous avez démontré, dans votre façon de vous comporter, que vous êtes honnête et fiable.
  • Professionnalisme et éthique: Vous avez réussi l’Examen sur l’exercice de la profession.

Selon votre situation, ce processus peut prendre plusieurs années. Cependant, vous pouvez quand même commencer à travailler en ingénierie même si vous n’avez pas reçu une certification de la part d’un organisme réglementaire, tant que vous êtes supervisé par un ingénieur certifié qui assume la responsabilité de votre travail sur le plan professionnel. Les critères qui posent surtout problème pour la plupart des candidats sont les exigences en matière d’éducation et d’expérience de travail. Si vous êtes diplômé d’une université d’un pays qui n’est pas signataire de l’Accord de Washington, votre éducation devra être évaluée. Vous devrez fournir des relevés de notes officiels, des descriptions de cours et devrez peut-être même compléter des examens techniques. Dans la plupart des provinces et territoires, vous devrez aussi démontrer que vous détenez au moins quatre ans d’expérience de travail en ingénierie.

Vous pouvez acquérir la plupart de l’expérience de travail exigée à l’extérieur du Canada, bien qu’un minimum d’un an d’expérience dans un environnement canadien soit requis pour tous les candidats dans toutes les juridictions. Vous devrez présenter cette expérience dans le format exigé par l’organisme réglementaire. De manière générale, votre expérience de travail en ingénierie devrait démontrer que vous détenez les compétences essentielles en matière d’ingénierie requises pour l’obtention d’une certification.

  • Compétences techniques
  • Communication
  • Gestion de projet et gestion financière
  • Capacité à travailler efficacement en équipe
  • Imputabilité sur le plan professionnel
  • Connaissances des projets sociaux, économiques, environnementaux et durables
  • Volonté de se perfectionner et d’apprendre continuellement

Afin de protéger l’intérêt public, l’organisme réglementaire en matière d’ingénierie auprès duquel vous avez fait demande évaluera votre d’année d’expérience canadienne en ingénierie, et ce, pour deux raisons :

  • Pour s’assurer que vous êtes familier avec les pratiques, les codes et les normes canadiens en ingénierie, de même que les autres pratiques culturelles, techniques et d’affaires. Dans le domaine du génie civil, j’ai remarqué que plusieurs ingénieurs civils formés à l’étranger possédaient peu d’expérience au niveau des normes pour la construction utilisant du bois, par exemple.
  • Pour confirmer le niveau d’expérience de travail en ingénierie complété à l’extérieur du Canada.

L’exigence relative à l’expérience canadienne a fait l’objet de plaintes au niveau des droits humains devant les tribunaux, mais sans succès.

Certains ingénieurs formés à l’étranger seront peut-être étonnés de constater leur environnement de travail au Canada, où l’on fait activement la promotion de l’équité hommes-femmes. Environ 30 % des étudiants au sein des programmes d’ingénierie des universités canadiennes sont des femmes et la profession s’est fixée comme objectif de compter 30 % de femmes parmi les nouveaux ingénieurs d’ici 2030. De plus, en matière de diversité, j’ai observé au cours de ma carrière d’ingénieur que le bagage d’expérience des membres d’une équipe typique est vaste et qu’il mène à des solutions constructives et à un environnement de travail agréable. Il est important d’être conscient de la diversité qui existe au sein des milieux de travail canadiens et d’être disposé à respecter cet aspect. Communiquez avec votre consultant en emploi d’ON Bâtit pour plus d’information sur la façon d’entreprendre le processus visant à devenir un ingénieur au Canada.